La réforme de la procédure d'instruction des AT/MP

Dans le prolongement de la réforme de la justice du XXIème siècle résultant de la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016, de l’ordonnance du 16 mai 2018 et du décret n°2018-772 du 4 septembre 2018 désignant les tribunaux de grande instance et cours d’appel compétents en matière de contentieux général et technique de la sécurité sociale et d’admission à l’aide sociale, le décret n°2019-356 du 23 avril 2019 réforme la procédure d’instruction des déclarations d’accidents du travail et de maladies professionnelles du régime général.

Les dispositions issues du décret susvisé qui ne concernent que le régime général (et non le régime agricole) entreront en vigueur le 1er décembre 2019 et s’appliqueront aux sinistres déclarés à compter de cette date.
 
La Caisse Nationale d’Assurance Maladie a commenté ces nouvelles dispositions dans deux circulaires (CIR 28/2019, CIR 22/2019).

Les points clés de cette réforme de l’instruction des accidents du travail et des maladies professionnelles se présentent ainsi :

- L’encadrement des réserves émises par l’entreprise  

L’employeur disposera désormais d’un délai de 10 jours francs courant, soit à compter de laquelle il a déclaré l’accident du travail, soit de la date à laquelle il en a été informé, pour émettre des réserves motivées quant à la matérialité du fait accidentel.  

En l’absence de précision du décret sur la notion de réserves motivées, il convient de se référer à la définition  qu’en donne la Cour de cassation : « constituent des réserves au sens de l’article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, les contestations par l’employeur du caractère professionnel de l’accident, qui portent sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l’existence d’une cause totalement étrangère au travail ».

L’émission de réserves motivées déclenche, comme par le passé, l’obligation pour la CPAM d’adresser un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l’accident à l’entreprise ainsi qu’à la victime.

Le décret impose à l’entreprise de retourner le questionnaire dans un délai de 20 jours francs à compter de sa réception.

Lors de l’envoi du questionnaire ou, le cas échant, lors de l’ouverture de l’enquête, la CPAM sera tenue d’informer l’entreprise du délai de 90 jours, dont elle dispose pour statuer sur le caractère professionnel de l’accident.

 

- L’exigence d’information de l’entreprise quant à la procédure d’instruction mise en œuvre et le renforcement de la phase de consultation du dossier

  • En ce qui concerne les accidents du travail, en cas d’instruction, la CPAM devra informer l’entreprise de la date d’ouverture et de la date de clôture de la période au cours de laquelle elle pourra consulter le dossier ainsi que celle au cours de laquelle elle pourra formuler des observations au plus tard 10 jours francs avant le début de la période de consultation.

    Le décret distingue deux périodes à l’issue des investigations menées par la CPAM :
    Au cours d’une première période, débutant au plus tard 70 jours à compter de la date de réception par la CPAM de la déclaration d’accident du travail et du certificat médical initial, l’entreprise disposera d’un délai de 10 jours francs pour consulter le dossier et faire valoir ses observations, lesquelles seront annexées au dossier.
    Puis, au terme de ce délai de 10 jours francs, l’employeur pourra exclusivement consulter le dossier sans formuler d’observations.
     
  • En ce qui concerne les maladies professionnelles, la phase de consultation du dossier constitué par la Caisse dont dispose l’employeur à l’issue de l’instruction fait l’objet d’une clarification des obligations incombant à la Caisse primaire et comporte une phase d’enrichissement du dossier par le biais des observations des parties.   

    En présence d’une pathologie figurant dans un tableau de maladies professionnelles et remplissant les conditions posées par ce tableau, à l’issue des investigations et au plus tard 100 jours francs à compter de la date à laquelle elle dispose de la déclaration de maladie professionnelle (et le cas échéant des examens médicaux complémentaires) la Caisse sera tenue de mettre le dossier constitué à la disposition de l’entreprise et de la victime, lesquelles disposeront d’un délai de 10 jours pour consulter le dossier et faire connaître leurs observations. Au terme de ce délai de 10 jours francs, ils pourront exclusivement formuler des observations.

    En présence d’une pathologie ne remplissant pas les conditions posées par le tableau de maladie professionnelle ou en cas de pathologie hors tableau nécessitant la saisine du Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles (C.R.R.M.P), la Caisse primaire sera tenue de mettre le dossier constitué à la disposition de la victime et de l’entreprise pendant un délai de 40 jours francs se décomposant en 2 périodes :
    - Au cours des 30 premiers jours, tant l’entreprise et la victime, que la Caisse et le service du contrôle médical pourront compléter le dossier ;
    - Au cours des 10 jours suivants, l’entreprise et l’assuré pourront exclusivement consulter le dossier et formuler des observations.


- L’instruction des nouvelles lésions par la CPAM

  • En cas de nouvelles lésions consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, la Caisse primaire disposera d’un délai de 60 jours francs à compter de la réception du certificat pour statuer sur l’imputabilité de la nouvelle lésion à l’accident ou à la maladie.
    Le décret prévoit la possibilité pour l’entreprise de formuler des réserves motivées dans un délai de 10 jours francs courant à compter de la réception du certificat médical.
    En cas de réserves motivées par l’employeur ou s’il estime nécessaire, le médecin-conseil peut adresser un questionnaire à la victime, laquelle dispose d’un délai de 20 jours francs pour y répondre.


Les nouvelles dispositions issues du décret n°2019-356 du 23 avril 2019, qui imposent de nouvelles obligations à la Caisse primaire dans le cadre de l’instruction des accidents du travail et des maladies professionnelles, requièrent la vigilance des entreprises, lesquelles devront veiller à suivre minutieusement les différentes étapes de la procédure de reconnaissance de l’accident du travail ou de la maladie professionnelle.

A suivre….



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