L'égalité dans l'accès à la justice. Un particulier ou une entreprise, désireux d'intenter un procès pour faire valoir ses droits en justice, prendra nécessairement en compte le critère économique dans le cadre de sa réflexion. En effet, outre les honoraires des avocats, le procès peut exiger le recours à un ou plusieurs experts, des analystes financiers, des enquêteurs, des traducteurs, etc, le tout sur plusieurs années en fonction des recours éventuels successifs. A ces frais incompressibles, viennent s'ajouter, en matière d'arbitrage, les coûts de la justice arbitrale.
Ces frais peuvent s'avérer dissuasifs à l'engagement d'une action. Même si le litige présente des chances de succès indéniables, nombre de plaignants renoncent tout simplement à faire valoir leurs droits en justice, à défaut de pouvoir financer un procès qu'ils redoutent comme étant à la fois long et coûteux : une entreprise craindra que son cocontractant plus puissant économiquement, ne fasse perdurer le procès à son détriment, une autre ne disposera que d'une trésorerie limitée et préfèrera investir dans son activité, une troisième encore ne pourra pas recourir à un emprunt bancaire pour financer son procès.
Pour rétablir, alors, l'égalité entre les parties dans l'accès à la justice, le plaignant peut envisager de recourir à une Société de Financement de Procès (SFP) ou Third Party Funding (TPF).
Le mécanisme. D'origine anglo-saxonne, le TPF est une pratique de financement par un tiers, de tout ou partie des coûts d'un procès. Le cas échéant, sont aussi pris en charge les frais de recouvrement des sommes allouées au titre de la décision de justice ou de la sentence arbitrale.
En contrepartie, le financeur perçoit, généralement, une rémunération calculée en pourcentage des sommes allouées par la décision ou recouvrées à l'issue de l'action (entre 20 et 60% selon les sociétés).
Dès lors qu'une prise en charge est acceptée, l'investisseur assume seul les risques financiers liés à la procédure. Ainsi, en cas d'échec, il ne percevra, certes, aucune rémunération mais il ne demandera pas à son client le remboursement des frais qu'il aura avancés pour lui. Cette pratique obéit à une logique « gagnant-gagnant ».
Ce mécanisme peut se mettre en place à tout moment du procès : avant l'engagement de l'action, pendant le procès, ou au stade du recouvrement des sommes allouées par la décision.
En France, cette activité n'est pas – encore – encadrée ni règlementée. Il n'existe pas non plus de code de bonne conduite relative à cette pratique, à la différence d'autres pays (au Royaume-Uni, par exemple).
Les tiers financeurs sont généralement des fonds d'investissement spécialisés, mais cette activité peut également être exercée par des institutions financières, des banques ou des compagnies financières.
Cette technique est encore assez confidentielle en France mais elle a vocation à se développer dans les années à venir. D'abord cantonnée aux procédures arbitrales à raison des coûts que celles-ci représentent pour les parties, la technique tend aujourd'hui à se généraliser aux procédures judiciaires. Elle est d'ailleurs destinée à tous types de justiciables (entreprises et particuliers).
Un contrat sui generis. En France, le financement de procès par un tiers est soumis aux seules dispositions contractuelles discutées entre les parties.
S'agissant de sa qualification, le contrat proposé par le tiers financeur implique un certain nombre de prestations de nature composite, ce qui a conduit la doctrine à s'interroger sur sa qualification et sa licéité en droit français.
Ce n'est ni un contrat d'assurances (absence d'aléas sur la survenance de l'évènement qu'est l'action en justice), ni un contrat de prêt (la partie financée n'a pas d'obligation de remboursement des sommes).
La jurisprudence semble opter pour la qualification de contrat d'entreprise, dès lors que la rémunération de l'investisseur peut faire l'objet d'une réfaction lorsqu'elle est jugée excessive.
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